❖ don’t you wanna turn the beauty into the beast.

1) Que pensez-vous de Center City ? Est-ce plaisant d'y vivre, ou alors pas du tout?
Je suis ici depuis tellement longtemps, en fait, j’ai l’impression d’avoir toujours habité Center City, même si mes parents n’ont de cesse de me rappeler que l’Angleterre est ma mère patrie. Pays que je n’ai visité qu’à de rares occasions, durant ma courte existence. Non, définitivement, ma place est ici, à Philly. Au moins, j’y ai mes repères, je connais la ville par cœur, ce qui n’est pas une mauvaise chose dans ma situation. Je m’y suis toujours sentie à ma place. Enfin, jusqu’à tout récemment. Disons que depuis, un mur opaque me sépare du reste du monde. Comment ne pas se sentir à l’écart, dites-moi.
2) Savez-vous gardez un secret ou alors vous devez absolument le répété?
Ça dépend. Il y a plusieurs facteurs qui entrent en compte. La teneur du secret, par exemple, et le genre de relation que j’entretiens avec cette personne, de la confiance qui règne entre elle et moi. Si par le passé, elle a déjà trahi l’une de mes confidences, il n’est pas dit que ces secrets seront en sureté entre mes mains. Mais si cet être compte assez à mes yeux, ou si ce secret risque d’avoir un drastique impact sur la vie d’autrui, il est possible que j’en vienne à le garder pour moi. Du moins, pour un certain temps. Peut-être qu’il m’échappera, un jour ou l’autre…
3) Avez-vous une théorie sur toutes ces soudaines disparitions? Êtes-vous victime de ce stupide canular de -A?
Honnêtement, je n’en ai aucune idée, et je m’en fiche. Ce n’est pas mon travail d’élucider ces disparitions, mais bien celui des policiers de notre charmante ville. Ils sont payés pour ça, n’est-ce pas? Alors qu’ils fassent leur boulot et qu’ils trouvent le coupable. Non, mais ce serait le comble, quand même, qu’un simple citoyen lambda en vienne à déceler  ce mystère, vous ne trouvez pas? Ils deviendraient alors la risée de leur profession. Quel tristesse.
4) Lorsque votre téléphone portable sonne, êtes vous terrifiez, surexcité, normal ou triste? Dites-nous tout. Que contienne ces messages pour vous mettre dans cet état.
Faire partie de l’élite apporte son lot de désavantages. Être la cible des attaques de ce –A figurait parmi ceux-ci. Au début, oui, la panique m’a envahie jusqu’à un certain point : ces messages contenaient des informations que peu de personnes connaissaient, et je me suis questionnée : lequel de mes proches avait pu ainsi trahir ma confiance. Mais semble-t-il que je n’étais pas la seule dans cette situation, et à force, j’en suis venue à me moquer de ces interventions. Aujourd’hui, toute cette histoire passe au  second degré : j’ai bien d’autres chats à fouetter que ces enfantillages. J’ai une vie à me reconstruire.
5) Étiez-vous proche des victimes ? Si oui, quel liens aviez-vous avec elle(s)?
Je ne connaissais aucune de ces adolescentes de par leurs noms. Peut-être que leur visage m’est familier, peut-être les ai-je croisés dans les rues de Philly, mais impossible de vous le dire, puisque ma vision défaillante m’en empêche et ma mémoire me joue des tours. Je ne risque pas d’être bien utile à cette enquête.
6) Quel est le moment le plus marquant de votre vie jusqu'à maintenant ?
Je crois que la perte de ma vue est de ces choses que l’on n’oublie pas si facilement. D’autant plus que je suis confrontée à cette nouvelle réalité du soir au matin – bien que je sache difficilement faire la différence, désormais, car dans mon cas, il fait tout le temps noir! La vie doit avoir une dent contre moi ou elle s’amuse à mes dépens, dans tous les cas, elle s’acharne, c’est évident. Dès que je touche une parcelle de bonheur, elle vient me l’arracher. Cette blessure au genou, adolescente, qui m’empêcha de faire cette grande école de ballet, puis, cet accident qui mit fin prématuré à ma toute nouvelle carrière d’avocate. Pourquoi a-t-il fallu que ce projecteur tombe en plein concert, et sur mon piano de surcroît? C’est la dernière chose que ce regard à vue.  Cette poudre de verre qui s’est logé dans mes yeux, je me souviens encore de la douleur, de la brulure que j’ai ressentie. Je n’oublierai jamais ça. Comment le pourrais-je, de toute façon.  
6) Que pense vos amis de vous?
J’ai coupé les ponts avec une bonne partie de mon cercle d’amis après l’incident, soit parce qu’ils me prenaient en pitié, ou, car, sous leurs faux airs concernés, ils se fichaient carrément de moi. Parce que mon "état" me classait désormais parmi les faibles à leurs yeux. C’est vous dire à quel point j’ai de bons amis, n’est-ce pas. Certains me sont restés fidèles – ils sont rares -, et j’ose croire que, malgré toutes mes crises de nerfs et ces caprices que j’ai, ils arrivent encore à me tolérer, à voir plus loin que les simples apparences. Violet, notamment, est une véritable perle. Je lui fait des misères, trop souvent d’ailleurs, mais elle est toujours là. C’est qu’elle doit m’apprécier, j’imagine.
7) Quel est votre réel opinion sur toute cette affaire de disparitions de -A ?
En ce moment, mon intérêt pour ces disparitions frôle le zéro. Mon esprit se trouve à des lieux de toute cette histoire, et je crois qu’il n’est pas bien difficile de comprendre pourquoi. Je ne connais pas ces gens, et franchement, ils doivent vivre ce drame difficilement, alors si on pouvait bien leur foutre la paix, je crois qu’ils ne s’en plaindraient pas. Et puis, disons que j’ai d’autres priorités que de me faire du sang d’encre avec tout ça, avec cet événement qui ne me touche, ni de près, ni de loin.
8) Êtes vous un bon menteur?
Mentir est, chez moi, une deuxième nature. Je ne le fais pas par plaisir, je le fais pour me protéger. Des autres, de vous, de mes proches, et surtout, de moi-même. Il est tellement facile de se convaincre que tout va bien alors que notre univers se fissure de toute part. Bien plus facile que de voir la vérité en face.